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NOTICE BIOGRAPHIQUE

de mestre de camp des gardes à la place du maréchal de Gramont, puis la survivance du duc de Bellegarde dans les fonctions de grand écuyer, enfin, un peu plus tard, la succession de Gassion comme mestre de camp de la cavalerie légère. Mais toutes ces offres, ou ne donnaient à Marcillac que des espérances éloignées, partant incertaines, ou allaient à déposséder des gens que, par reconnaissance ou scrupule, il voulait et devait ménager : il refusa donc ce qu’il ne pouvait accepter, et ce fut un beau succès pour l’artificieux cardinal, qui d’ailleurs s’entendit toujours à gagner du temps et à mettre dans son jeu les qualités de ses adversaires aussi bien que leurs défauts. Avec ce noble désintéressement, Marcillac se laisse amuser et néglige de saisir à point les occasions de sa fortune. Peut-être aussi visait-il plus haut, par une de ces ambitions si déraisonnables qu’elles ne sont pas même soupçonnées[1] ; mais des Mémoires, quelque sincères qu’on les suppose, ne poussent jamais à fond la sincérité, et la Rochefoucauld, dans les siens, a beau se vanter d’avoir mesuré le premier la puissance du Cardinal son ennemi, il est permis de croire qu’un reste d’illusion entretenait en lui de vagues espérances qui allaient au delà d’une charge de grand écuyer ou de mestre de camp. En tout cas, il ne veut point quitter la place, ni s’éloigner de la Reine : il supplie celle-ci de ne l’établir « que dans ce qui seroit utile à son service particulier[2]. » Mais, depuis que Mazarin était auprès d’elle, Anne d’Autriche voyait de moins en moins la nécessité d’accaparer le dévouement et la personne du chevaleresque Marcillac.

Sur ces entrefaites eut lieu le fameux incident des lettres trouvées chez Mme de Montbazon[3], et que la malignité de cette dernière fit attribuer un instant à Mme de Longueville. Il est inutile de revenir, après V. Cousin[4], sur les détails de cette curieuse affaire, qui, amenant la disgrâce de Mme de Montbazon, poussa Mme de Chevreuse, Beaufort et les Importants à un maladroit complot contre le Cardinal ; il suffira de dire que Marcillac, qui avait alors « peu d’habitude avec Mme de Lon-

  1. Voyez la maxime 91.
  2. Mémoires, p. 78.
  3. Ibidem, p. 82 et suivantes.
  4. Voyez Madame de Chevreuse, chapitre v.