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NOTICE BIOGRAPHIQUE

Cependant les deux partis, celui des Princes et celui de la Régente, à la tête duquel s’était mis Retz, désormais nanti du chapeau, se heurtaient, en toute rencontre, avec une aigreur et un fracas précurseurs de la guerre. Peu s’en fallut que la grande salle du Parlement ne devînt le premier champ de bataille. C’est dans une de ces séances orageuses[1] que le duc de la Rochefoucauld prit traîtreusement la tête de Retz dans une porte et le maintint dans cette position critique, donnant ainsi à ceux qui l’entouraient le loisir de tuer le prélat, pour peu qu’ils en fussent tentés. La Rochefoucauld rapporte lui-même le fait dans ses Mémoires avec ce calme froid qui rend l’aveu d’une violence plus odieux peut-être que la violence même[2]. Passons vite sur de tels actes qui nous paraissent aujourd’hui indignes d’un gentilhomme, mais que nous retrouvons fréquemment dans les anciennes histoires de nos troubles civils[3].

On ne racontera pas ici par le menu les incidents de cette troisième guerre intestine qui éclata, en 1652, par l’énergie de Mme  de Longueville, au moment même où chacun, suivant l’expression de notre auteur, se repentait « d’avoir porté les choses au point où elles étoient[4], » et en voyait clairement l’horreur. La Rochefoucauld, retiré de nouveau en Guyenne avec les Condés, recommence, mais avec peu d’enthousiasme cette fois, une vie d’aventures sans éclat où devaient s’éteindre ses dernières illusions. Il aide Monsieur le Prince, non sans courir de grands risques, à réprimer la révolte des bourgeois d’Agen, et se fait, avec lui, ouvrir successivement deux barricades[5]. Puis il fait partie, avec son jeune fils Marcillac, de

  1. Celle du 21 août 1651.
  2. Mémoires, p. 283-288 ; comparez Mme  de Motteville, tome III, p. 418-420, et surtout Retz, tomes III, p. 492-494, 500, et IV, p. 283, 284.
  3. Voyez aussi, dans les Mémoires, p. 198 et 199, l’histoire du pauvre gentilhomme Canolles, pendu à Bordeaux, par ordre de la Rochefoucauld et de Bouillon.
  4. Mémoires, p. 298.
  5. Ibidem, p. 341-343 ; Mémoires de Gourville, p. 254 — Voyez ci-après, à l’appendice v, 6° (p. cviii), l’indication de pièces relatives aux mesures prises contre notre duc durant cette nouvelle révolte. — Il est curieux de voir un État de la France (Paris, G. Loyson)