Page:La Société nouvelle, année 8, tome 1, 1892.djvu/329

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Nous continuâmes un peu plus loin, et regardant à droite de nouveau, je dis presque sur un ton de doute : « Tiens, là se trouvent les maisons du Parlement ! Les employez-vous encore ? »

Il éclata de rire et resta quelque temps avant de pouvoir se remettre ; puis, me tapant sur l’épaule, il dit :

« Je vous y prends, voisin ; vous pouvez bien vous étonner que nous les ayons laissés debout, et je sais quelque chose de ce fait, car mon vieux parent m’a donné des livres pour y lire quels jeux étranges on jouait là dedans. Les employer ! Eh bien, oui, elles sont employées comme une sorte de marché auxiliaire, et comme magasin d’engrais, et elles sont très commodes pour cet objet, étant situées au bord de l’eau. Je crois qu’il fut question de les démolir au commencement de notre époque, mais il y avait, comme on m’a raconté, une bizarre société d’antiquaires qui avait rendu quelques services au temps passé, et qui s’opposait violemment à leur destruction, comme du reste elle l’a fait pour plusieurs autres édifices, que la plupart des gens regardent comme sans valeur et comme une plaie publique ; l’opposition fut si énergique et trouva de si bonnes raisons à donner qu’elle atteignit son but. Je dois avouer, cela étant ainsi, que j’en suis content : parce que, à ne considérer les choses qu’au plus mal, ces ridicules vieux bâtiments servent comme une sorte de contraste auprès des superbes édifices que nous construisons maintenant. Vous en verrez plusieurs autres dans ces lieux ; sur la place où habite mon aïeul, par exemple, s’élève un grand édifice nommé Saint-Paul. Vous verrez que dans cette matière nous n’avons pas besoin de porter envie à quelques pauvres bâtisses restées debout, car nous pouvons toujours bâtir ailleurs, et que nous ne devons pas craindre de manquer d’agréable besogne de cette espèce, car il y a toujours moyen de trouver de plus en plus d’ouvrage dans un nouvel édifice, même sans le faire prétentieux. Par exemple, avoir de l’espace à l’intérieur, c’est pour moi une chose si agréable que, si j’y étais obligé, je consentirais presque à sacrifier à l’étendue l’aspect extérieur. Puis, naturellement, il y a les ornements qui, nous devons tous l’avouer, peuvent facilement être surchargés dans les maisons particulières, mais difficilement dans les mote-halls, marchés, etc. Je dois vous dire, cependant, que mon aïeul m’a souvent reproché d’être un peu toqué au sujet des beaux édifices ; et vraiment je crois que l’énergie des hommes leur est principalement utile pour de tels travaux ; car, dans cette direction, je ne vois pas de fin à l’ouvrage, tandis que dans beaucoup d’autres une limite me paraît possible.