Page:La Société nouvelle, année 8, tome 1, 1892.djvu/784

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Mais cependant, en considérant la chose d’une manière plus calme, vous vous attendiez donc à voir des enfants mis à l’école dès qu’ils ont atteint un âge conventionnellement supposé d’être l’âge propice, n’importe quelles puissent être leurs facultés et dispositions variées ; mais quand ils en sont là, les enfants et les choses que l’on enseigne sont traités aussi d’une façon conventionnelle. Mon ami, ne pouvez-vous voir que des procédés pareils viennent de l’ignorance de ce que doit être le développement aussi bien mental que physique ? Personne ne pouvait sortir d’un tel moulin sans être meurtri ; et seulement ceux qui avaient une forte dose d’esprit de révolte, pouvaient en sortir sans être écrasés.


Heureusement, la plupart des enfants l’ont eu en eux cet esprit, de tous temps, sans cela je ne sais pas comment nous aurions jamais pu arriver à la situation actuelle. Maintenant vous voyez à quoi tout cela a abouti. Dans les vieux temps, tout était le résultat de la pauvreté. Au XIXe siècle, la société était si misérablement pauvre, à cause du vol systématique sur lequel elle était fondée, que l’éducation réelle était impossible pour tout le monde. Toute la théorie de leur soi-disant éducation était fondée sur ceci, qu’il était nécessaire de faire entrer un peu de savoir dans la tête d’un enfant, même au moyen de tortures et avec accompagnement de bavardages que l’on savait très bien ne servir à rien ; on pensait autrement que l’enfant aurait été privé d’instruction pour toute sa vie : la « presse de la pauvreté * ne permettait rien autre chose. Tout cela est passé, cette « presse » n’existe plus et l’instruction est à la portée de tous ceux que leur propre inclination pousse à la rechercher. Ici comme ailleurs, nous sommes devenus riches, nous pouvons nous donner le temps de nous développer. »


« Oui, » dis-je, « mais supposez l’enfant, le jeune homme ou un homme, qui n’aurait jamais le désir de s’instruire, qui ne se développerait jamais dans la direction que vous espérez ; supposez, par exemple, qu’il ne veut pas apprendre l’arithmétique ou les mathématiques ; vous ne pouvez pas l’y forcer quand il est grand ; ne pourriez-vous pas l’y obliger pendant qu’il est jeune et ne devriez-vous pas le faire ? »


— Bien, mais étiez-vous forcé d’apprendre l’arithmétique et les mathématiques ?


— Un peu.


— Et quel âge avez-vous maintenant ?


— Mettons 56 ans.


« Et que savez-vous encore de l’arithmétique et des mathémathiques, » demanda le vieillard avec un sourire un peu moqueur.


— Rien du tout, je suis triste de l’avouer.


Hammond riait tranquillement mais ne fit pas d’autres commentaires