Page:La Vallée-Poussin - Les Conciles bouddhiques.djvu/48

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
40
[252
LE MUSÉON.

que les religieux hérétiques ; il ne faut rien supprimer des lois petites et très petites ».

Il a fait au Bouddha d’assez larges concessions quand il a revêtu sa nudité ascétique de la triple robe : avant de devenir le fidèle du lion qui rugit la voie du nirvāṇa, il s’est assuré que Gotama ne condamne pas toute pénitence, qu’il ne réprouve pas les ascètes qui mènent une vie dure, et seulement alors il a consenti à humilier son propre rugissement. — Mais il ne glissera pas plus loin qu’il ne faut sur la pente du « laxisme ».

À comprendre certain passage du Milinda comme un apologue, nous y trouverons la confirmation de cette manière de voir. « Pourquoi, demande Milinda, le Bienheureux a-t-il autorisé l’abrogation des petites règles ? Et n’entre-t-il pas, par ce fait, en contradiction avec lui-même ? » — « Non, répond Nāgasena ; Bhagavat n’a autorisé l’abrogation des petites règles que pour éprouver ses bhikkhus. De même, un roi conseillera à ses enfants d’abandonner les districts de frontière, “car ce royaume est grand et difficile à conserver avec les forces dont nous disposons”. Mais les princes, à la mort du roi, abandonneront-ils les districts de frontière qu’ils tiennent déjà ? » — « Non, répond Milinda, “les rois aiment à prendre” ; les princes conquerront peut-être de nouveaux territoires, deux ou trois fois grands comme leur héritage, mais ils n’abandonneront pas une parcelle de ce qu’ils tiennent. » — « De même, ô roi, reprend Nāgasena, les fils du Bouddha, dans leur amour de la loi, pourront tenir deux cent cinquante règles, mais ils n’abandonneront jamais une loi qui a été régulièrement établie ».

De même que les rois, les ascètes sont très convoiteux (luddhatara). Ce sont leurs conquêtes successives qui ont