Page:La chanson de Sainte Foi d’Agen.djvu/79

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XI. — Après avoir eu robe de prix avec manche pendante (?), elle se mit pour Dieu en grande pauvreté. Elle laissa les autres de sa condition, et se prit hardiment à chercher Dieu. Ne doutez pas qu’il ne la récompense [105] d’avoir voulu désormais être son ouvrière et sa fidèle servante et de s’être appliquée à s’offrir à lui ; c’est là la droite voie.


XII. — Je vous dirai [maintenant] de ces païens [110], combien durement ils traitèrent les chrétiens. Quand saint Adrien fut tué, Dioclétien était roi ; il fut roi des Grecs et des Romains ; il tint l’Espagne et les monts de Cerdagne [115]. Licin fut son fils aîné, et, quand il fut né, il lui donna des maîtres. Il se dressa contre Dieu, ce vieux chien ; il lui tua les saints des deux mains. Maintenant il est tout à bas [120], sous mille diables, la tête coupée. Son associé fut Maximien.


XIII. — Ensemble ils accordent leur affaire : ils chérissent trop les idoles ; ils ordonnent de les adorer et de les honorer [125] et par terre et par mer. Et ils prirent un félon cupide : c’est Dacien, que Dieu maudisse ! Ils l’envoyèrent pour gouverner ce royaume, prendre et brûler les Chrétiens [130], et les serrer fortement et amèrement.


XIV. — Le voici venu à Agen. Ce fut un homme qui n’avait pas bonne intention. Il va faisant partout telles œuvres qui nous font savoir qu’il offense Dieu [135] : il adore le Diable et vend les hommes, et il guette et prend les Chrétiens : il tue les uns et il pend les autres, et il en brûle beaucoup dans la flamme. Et cela, il veut le faire trop souvent [140].


XV. — Quand ils apprennent que Dacien entre, ce fut grande joie pour les païens : ils dressent les idoles dans les temples et ils déploient les tentures sur les places. Ce fut un apparat mauvais et vain [145], et qui le trouva fut fou et badaud. Alors ils parlent des Chrétiens.


XVI. — « Seigneur, pourquoi avez-vous tant tardé ? Quand vous avez acquis ce royaume, vous auriez dû le visiter [150] avant qu’elle eût trompé notre peuple. Une demoiselle nous a prêché qu’il existe un Dieu bon en trois personnes. Qui prie ceux de ce pays, elle l’appelle fou et insensé [155]. Si cela n’est pas sévèrement châtié, vous en perdrez ce territoire et cette cité, car tout est sien par parenté.