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ET LES ŒUVRES DE LOUISE LABÉ.


ou laissée aller au siège de Perpignan, pour y conquérir le cœur du Dauphin ; mais « cette équipée, semi-guerrière, semi-amoureuse, » n’avait pas laissé de traces plus sérieuses dans sa vie de poète que dans sa vie de femme ; et du reste, pour calmer sa jeune imagination, on la maria. « Sa véritable vocation poétique ne paraît s’être révélée qu’à l’époque où elle connut Olivier de Magny. » Cet Olivier de Magny était Quercinois et secrétaire de Jean d’Avanson, ambassadeur du roi de France auprès du Pape, en 1550. L’ambassadeur s’arrêta à Lyon. Olivier présenté à Louise fut admis dans son « cénacle provincial, » où « il rayonna comme une étoile de première grandeur parmi ces nébuleuses lyonnaises… Louise se sentit fascinée, Phaon apparaissait à Sapho. Elle ne vit plus au monde que le jeune et brillant poète, lui-même ressentit soudain le contre-coup de la commotion qu’il avait donnée. » Alors l’influence littéraire d’Olivier, qui dans les élégies se fait sentir d’une façon discrète et à demi voilée, se découvre entière « dans les brûlants sonnets jaillis à la fois de leurs deux cœurs, tracés par leurs mains du même crayon et qui, pour la dernière perfection du rythme, appartiennent peut-être autant à l’amant qu’à l’amante. » Ici l’auteur se demande, dans une note, si cette liaison fut coupable, et il déclare hésiter à le penser ; puis il continue : « Mais les heures de l’amour étaient comptées pour eux. » Le secrétaire de l’ambassadeur fut obligé de se rendre à Rome. « Louise resta longtemps absorbée dans les