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« Le Chant de la Paix »

inexprimable et, c’est l’immensité de cet amour qui m’a fait commettre l’imprudence qu’aujourd’hui je dois payer de ma vie. Vous vous rappelez sans doute de la lettre que vous m’adressiez en Amérique et dans laquelle vous me révéliez votre amour. Ignorant si l’homme que vous aimiez éprouvait pour vous les mêmes sentiments, vous me parliez aussi de vos craintes. Jugez de ma surprise, de ma stupeur, lorsque je me rendis compte que l’homme que vous aimiez, n’était autre que celui que j’adorais moi-même… J’eus un instant l’idée de ne plus revenir en France, afin de ne pas être un obstacle au bonheur de cet homme qui venait de rencontrer en vous, une femme vraiment digne de son amour. Mais pourtant je compris vite qu’i est bien impossible à l’esprit d’imposer ses volontés au cœur… L’amour en reprenant sur moi-même son emprise, me faisait, malgré tout espérer… Incapable de supporter l’incertitude dans laquelle je me trouvais, je résolus de le revoir avant de renoncer à jamais à mon rêve… Lorsque je touchai de nouveau le sol de France, je me rendis sans hésiter chez lui. Là, je commis la grande imprudence de tromper la consigne en pénétrant dans son cabinet de travail. Forcé par les circonstances il dut, pour que rien ne soit dévoilé, me révéler l’existence du passage secret. Je suis la jeune fille dont faisait mention le billet qu’il vous confia le jour de son arrestation… Qui donc fut témoin de ma fuite ? Je l’ignore, mais ma sortie ne passa pas inaperçue puisqu’elle facilita le vol des plans et faillit causer l’arrestation de Jean Desgrives… Lorsque je résolus de le sauver, il était juste et d’une extrême importance que toutes les responsabilités retombent sur moi. Connaissant le cœur noble de Jean, je savais qu’il n’accepterait pas mon sacrifice si je ne lui donnais pas des preuves évidentes de ma culpabilité. Pressée par les circonstances, je dus m’incriminer odieusement à ses yeux et aux yeux du