Page:Laberge - Le destin des hommes, 1950.djvu/35

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
33
LE DESTIN DES HOMMES

rendre chez son fils. Longtemps elle y songea, puis, dans le grand silence, elle s’endormit. Lorsqu’elle s’éveilla, elle regarda l’heure. Neuf heures et demie et papa qui n’est pas encore rentré. Il s’attarde, se dit-elle. Elle ouvrit la porte et regarda au dehors. La nuit était très noire, une neige épaisse tombait et il faisait grand froid. Elle attendit encore quelques minutes, puis, comme le vieux n’apparaissait pas, elle s’habilla, alluma son fanal et partit pour aller au devant de lui et le ramener. Elle se rendit jusque chez son frère sans rencontrer qui que ce soit.

— Papa est parti il y a une demi-heure. Tu dois l’avoir croisé sur la route, mais il fait tellement noir que tu as pu passer à côté de lui sans le voir. Il doit être arrivé à la maison, déclara François.

Zéphirine prit le chemin du retour. Elle regardait de chaque côté d’elle pour voir si elle n’apercevrait pas son père. Puis elle se mit à l’appeler : Papa ! Papa ! Si vous m’entendez, répondez-moi. Je vous cherche.

Personne ne lui répondit. Elle tâchait aussi de voir s’il n’y avait pas de traces sur la route, mais même s’il y en avait eu, la neige et le vent les auraient fait rapidement disparaître. Inquiète, alarmée, elle arriva à la maison. Aucune lumière. Elle entra. Son père n’était pas là. Ne sachant que faire, elle alla frapper chez le voisin, à trois arpents de chez elle, et le mit au courant de la situation.

— Il doit s’être perdu. Je vais vous aider à le chercher, déclara l’habitant.

Ils allaient l’un à côté de l’autre, fouillant les ténèbres avec leur fanal, regardant à leurs pieds, devant et à côté d’eux, pour voir s’ils ne verraient pas soudain apparaître le vieux. Ce fut le voisin qui le découvrit. À côté du chemin suivi par les voitures, il aperçut quelque chose de noir. Il s’approcha, se baissa, palpa. C’était le casque de