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LE DESTIN DES HOMMES

— Quel montant faudrait-il mettre dans l’affaire ? hasarda Urgel déjà tenté par la proposition de M. Bardu.

— Disons que vous mettriez $500, répondit le promoteur.

À ce chiffre, Urgel blêmit.

— Voyez-vous, continua M. Bardu, vous donneriez une exhibition de tours de force à chaque séance et vous seriez payé pour ce travail. En plus, nous nous partagerions les profits à parts égales.

Fasciné par ces alléchantes promesses, Urgel sortit de sa poche le rouleau de billets qu’il avait reçu de son frère et compta les $500 que lui demandait M. Bardu. Là dessus et comme preuve qu’ils étaient associés, celui-ci lui remit une clé du gymnase. Désormais, Urgel était co-propriétaire du Club haltérophile Atlas. Il avait réussi à trouver sa voie et il envisageait l’avenir avec confiance.

Le mardi, Urgel se rendit de bonne heure à la salle et s’entraîna avec ardeur, mais il ne vit pas M. Bardu qui ne vint pas ce jour-là. Le lendemain, Urgel fit un gros travail avec les haltères et il était content de lui-même. M. Bardu, était encore absent. Urgel acheta le journal pour voir son portrait comme le lui avait promis son associé. Rien encore.

Le jeudi, Urgel eut une grosse surprise. Le propriétaire de l’immeuble se présenta. Il voulait voir M. Bardu qui lui devait trois mois de loyer. En apprenant cela, Urgel fut alarmé. Le jour suivant, il apprit le pire. Bardu était disparu, introuvable et il laissait des dettes un peu partout. L’un des hommes forts qui avaient pris part à la séance du vendredi lui apprit que ni lui ni ses camarades n’avaient depuis cinq semaines reçu un sou pour leurs services. Urgel comprit alors que si Bardu lui avait donné dix piastres après la soirée, c’était évidemment dans le but de le faire mordre à l’hameçon qu’il se proposait de lui