Page:Labiche - Théâtre complet, Calman-Lévy, 1898, volume 04.djvu/195

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témoin que je n’ai pas été le chercher. C’était un homme violent… il avait laissé tomber sa canne sur le dos de sa femme…

Cécile.

Et vous le défendiez ?

Frémissin.

Vous allez voir si je l’ai défendu !… Le grand jour arrive… tous mes camarades étaient à l’audience… J’avais préparé une plaidoirie brillante… Je la savais par cœur… Tout à coup, un grand silence se fait… et le président me dit en m’adressant un geste bienveillant : "Avocat, vous avez la parole ! " Je me lève… Je veux parler… impossible ! rien, pas un mot ! pas un son ! Le tribunal me regardait, le président me répétait : "Vous avez la parole…" Je ne l’avais pas du tout ! Mon client me criait : "Allez donc ! allez donc ! " Enfin, je fais un effort ! quelque chose d’inarticulé sort de mon gosier : "Messieurs, je recommande le prévenu à… toute la sévérité du tribunal." Et je retombe sur mon banc !

Cécile.

Et votre client ?

Frémissin.

Il a été condamné au maximum : six mois de prison !

Cécile.

C’est bien fait !

Frémissin.- C’était trop peu pour ce qu’il m’avait fait souffrir ! Aussi je n’ai jamais voulu recevoir d’honoraires… Il est vrai qu’il a négligé de m’en offrir… Et maintenant que vous me connaissez… voyez s’il m’est possible d’adresser moi-même à M. votre père… une demande…