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revenir de ces sanglantes folies, et quoique Montesquieu, un demi-siècle plus tard, écrivît encore « qu’il fallait être très-circonspect dans la poursuite de la magie et de l’hérésie[1] », il est sûr que ni la société française, ni la société anglaise, n’auraient présenté le spectacle singulier qu’offrait alors le fanatisme puritain.

Il est aussi certain que ce peuple sans arts, sans monuments, sans histoire, ne pouvait rivaliser de politesse avec la société de Louis XIV. Cet avantage nous l’avons jusqu’à présent conservé, et cela par mille causes qu’il serait trop long d’énumérer : la richesse accumulée, le loisir, une littérature classique, cette éducation répandue dans les anciennes sociétés et que les classes riches se transmettent sans qu’elle s’enseigne nulle part, les souvenirs et les exemples du passé, tout ce qui fait enfin l’excellence des vieilles nations, et ce qui, par exemple, depuis tant de siècles maintient au premier rang, parmi les nations civilisées, l’Italie étouffée par l’étranger.

Il était nécessaire de faire cette distinction entre la civilisation et les institutions politiques, pour plus d’une raison.

D’abord, pour ne pas se former de la supériorité de l’Amérique une idée qui serait fausse si elle était exclusive, et ensuite pour comprendre

  1. Esprit des lois, liv. XII, chap. v. Comp., chap. vi. « On pourrait prouver, dit-il ironiquement, que ce crime n’existe pas. »