Page:Laclos - De l’éducation des femmes, éd. Champion, 1903.djvu/40

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Ce second âge comprend un assez grand espace de temps, que la nature emploie à perfectionner l’individû et à le mettre en état de se reproduire. Les moïens dont elle se sert pour y parvenir sont le mouvement, l’appétit et le someil, moyens si heureusement unis que l’un ne manque jamais d’amener l’autre ; en effet, le mouvement fait naître l’appétit, l’appétit à son tour nécessite le mouvement et tous deux, dès qu’ils sont satisfaits, provoquent le sommeil. Il n’est pas besoin d’avoir beaucoup observé les enfants, pour scavoir que le mouvement est leur état naturel. Les entraves qu’on leur donne, les menaces qu’on leur fait, les châtiments qu’on leur inflige, les contraignent quelquefois, et ne les changent jamais ; les perd-on de vue un instant ? ils courent, ils sautent, ils s’agitent, il faut qu’ils se remuent. Un enfant tranquille, à moins qu’il ne soit fatigué, est un enfant malade ; ce simptôme est certain. Notre élève, disons mieux, celui de la nature, n’est pas contraint à ce repos forcé ; cette sage gouvernante le force, au contraire, à s’exercer sans cesse ; il a trop à faire pour rester en place.

De tous les animaux, l’homme est sans contredit celui qui s’accomode le mieux de nourritures différentes ; herbes, graines, fruits, poissons, chair, tout lui est bon. Malgré ces facilités, on sent assez que le soin de sa nourriture doit être une occupation, longue et laborieuse, pour un enfant sans force et sans expérience. Les herbes contiennent peu de sucs nourriciers, en proportion de leur volume ; les graines sont dispersées, et l’on en