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LA TERRE PATERNELLE.

admire toujours, comme malgré soi, tout ce qui semble dépasser la mesure ordinaire des forces humaines. D’ailleurs la passion pour ces courses aventureuses (qui heureusement s’en vont diminuant de jour en jour) était alors comme une tradition de famille, et remontait à la formation de ces diverses compagnies qui, depuis la découverte du pays, se sont partagé successivement le commerce des pelleteries. S’il est vrai que ces compagnies se sont ruinées à ce genre de commerce, il est malheureusement vrai aussi que les employés n’ont pas été plus heureux que leurs maîtres ; et l’on en compte bien peu de ces derniers qui, après plusieurs années d’absence, ont pu, à force d’économie, sauver du naufrage quelques épargnes péniblement amassées. Après avoir consumé dans ces excursions lointaines la plus belle partie de leur jeunesse pour le misérable salaire de 600 francs par an, ils revenaient au pays épuisés, vieillis avant le temps, ne rapportant avec eux que des vices grossiers contractés dans ces pays, et incapables, pour la plupart, de cultiver la terre ou de s’adonner à quelque autre métier sédentaire, profitable, pour eux et utile à leurs concitoyens.