Page:Lafargue - Pamphlets socialistes, 1900.djvu/161

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lancer sur eux toutes les plaies et tous les tonnerres ! Ah ! je suis impuissant !

Et le Tout-Puissant retomba épuisé.

—Mais c’est un maniaque ! pensa le Pape. — Tout est mal, ce qu’il a fait et ce qu’ont fait les autres… J’aurais été proprement reçu si je lui avais parlé de mes hémorroïdes, ainsi que le conseillait Antonelli. C’eût été d’ailleurs inutile ; Dieu n’est bon qu’à jeter aux chiens… Jésus est le Dieu qu’il me faut…

Pie IX se retira silencieusement et promptement.


III

À une petite distance de la bicoque de Dieu le père, le Pape-Dieu rencontra une troupe folâtre de femmes et de jeunes filles, parées d’étoffes voyantes et bigarrées. La bande joyeuse moutonnait autour d’un blond jeune homme, cheveux lustrés et bouclés, joues et lèvres peintes du plus bel incarnat, mains potelées et couvertes de pierreries. Ce jeune homme frais, coquet et pommadé semblait ne penser qu’à sa chevelure et à l’effet de ses charmes sur son entourage féminin. Ce petit gars était Jésus.

Oh ! combien différent de Christ le Nazaréen, du fils du charpentier, de l’ami de Jean-Baptiste, le pasteur sauvage dormant dans les cavernes et mangeant des sauterelles ! Combien différent du Christ qui, halluciné par la vue des misères humaines, s’enfonçait dans les déserts et jeûnait pour partager les tortures des affamés ;