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xiv
notice sur la vie et les ouvrages

instruments à vent, la largeur et la position de leurs trous, et la vitesse du son en général ; il est probable, en effet, que dans ces instruments surtout, l’air ne doit plus être considéré comme divisé en lignes droites ; mais au moins la solution explique la fameuse expérience de Tartini, si l’on admet que ce célèbre Professeur a pu se tromper en mettant l’octave à la place du son véritable qu’il entendait.

Euler sentit le mérite de la nouvelle méthode, qu’il prit pour l’objet de ses méditations les plus profondes ; d’Alembert ne se rendit pas. Dans ses lettres particulières, comme dans ses Mémoires imprimés, il proposait de nombreuses objections, auxquelles Lagrange a répondu depuis, mais qui peuvent au moins laisser ce doute : Comment, dans une science à laquelle on accorde universellement le mérite de l’exactitude, se peut-il que des génies du premier ordre soient divisés entre eux et puissent disputer longtemps ? C’est que, dans les problèmes de ce genre, dont les solutions ne peuvent être soumises à l’épreuve d’une expérience directe, outre la partie du calcul qui est assujettie à des lois rigoureuses et sur lesquelles il n’est pas possible d’avoir deux avis, il y a toujours une partie métaphysique qui laisse du doute et de l’obscurité. C’est que, dans les calculs mêmes, les Géomètres se contentent souvent d’indiquer la marche des démonstrations, qu’ils suppriment des développements qui ne sont pas toujours aussi superflus qu’ils l’ont pensé, que le soin de remplir ces lacunes exigerait un travail que l’auteur seul a le courage d’entreprendre, et qu’enfin lui-même, entraîné par son sujet et par l’habitude qu’il a acquise, se permet de franchir des idées intermédiaires, et devine son équation définitive, au lieu d’y arriver pas à pas avec une attention qui éviterait toute méprise ; c’est ainsi que des calcula-