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pêcheur pour me rendre ici, et je désire ne rien dévoiler à personne jusqu’à notre retour.


II


Rien n’a transpiré des colloques intimes entre Jacques et sa fiancée après son retour ; mais l’apparence de bonheur qui se dégageait de la personne d’Angéline n’était pas de nature à porter au pessimisme. Elle croissait toujours en grâce et en beauté, à mesure que le temps donnait à son apparence cette perfection qui ne s’acquiert qu’au plein développement de la femme.

De son côté, l’air presque prospère du nouveau propriétaire de mine d’or n’enlevait rien au charme du vaillant capitaine, qui se préparait, avec une ardeur fébrile, à la poursuite de sa découverte.

Ces deux âmes d’élite, faites l’une pour l’autre, unies par une amitié pure et sincère, devaient-elles jamais boire à la coupe de la douleur ? Issus tous les deux de familles humbles, forts de santé et de courage, élevés dans la crainte de Dieu et munis d’une instruction que bien des fils de famille ne possèdent pas, une brillante fortune en perspective, devaient nécessairement procurer aux futurs époux la paix et le bonheur d’ici-bas.

Le soleil qui éclairait l’avenir de ces bons jeunes amoureux n’empêcha pas celui du bon Dieu de faire son œuvre en fondant la neige des montagnes. Le bruit de la chute, causé par le grossissement de la rivière qui refoulait les glaces dans le golfe, annonçait que le printemps attendu avec impatience était enfin arrivé.

L’activité des pêcheurs témoignait qu’ils n’étaient pas pour perdre le fruit des premières pêches. Déjà les plus entreprenants avaient pris quelques morues, et rien n’indiquait que les marsouins feraient leur apparition.

La population, inquiète cependant, se demandait ce que pouvait bien venir faire sitôt dans la saison, le capitaine Vigneault. Les jeunes consultaient les sages du village ;