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— Que caches-tu là ainsi sous ton habit ?

Le sauvage se contenta de montrer ses grandes dents blanches et de sourire.

— Mais, est-ce de l’eau-de-vie que tu tiens là si précieusement ?

— Non, Père, pas eau-de-vie. Moi dire à Père tout seul.

Quand les autres sauvages furent partis, il sortit de sous son habit l’objet qu’il tenait si précieusement, et le missionnaire reconnut que c’était une partie de l’hélice d’un avion. Le Père l’ayant pris dans ses mains, constata qu’elle portait les initiales J. V. Il n’y avait plus de doute possible ! Il se trouvait bien en face de l’hélice de l’hydravion du capitaine Vigneault.

— Où as-tu trouvé cet objet ? questionna le missionnaire.

— Près de la grande chute qui pleure.

— Est-ce tout ce que tu as trouvé ? continua le missionnaire.

Le sauvage sortit un autre objet qu’il montra au Père.

— Moi, trouvé cette horloge.

L’ayant montrée au missionnaire, celui-ci constata que c’était une boussole. Il n’y avait donc plus de doute possible. Il envoya ces pièces à conviction par le premier bateau au curé de la Rivière-au-Tonnerre avec tous les détails que lui avait fournis le sauvage, ajoutant que, d’après son humble opinion, on retrouverait l’avion avec le corps de l’aviateur dans les environs de la chute ; car il n’avait pas dû périr loin du lieu où ces objets avaient été trouvés.

Ce ne fut pas sans une profonde émotion, que le brave curé de la Rivière-au-Tonnerre reçut ces pièces révélatrices du triste sort arrivé à celui qu’il avait appris à considérer, non seulement comme un sauveur, mais comme un ami.

Comment pourrait-il annoncer la triste nouvelle à Angéline ? Il se mit en prière, afin d’avoir le courage de remplir son pénible devoir avec assez de délicatesse pour ne pas trop affecter cette pauvre jeune fille de nature si sensible.