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Angéline dissimula son émotion, malgré la douleur intense qu’elle ressentait en elle-même, au récit que lui fit le curé des circonstances qui avaient dû entourer la mort de son fiancé.

Toutes les hypothèses étaient acceptées, mais personne ne put expliquer comment ces objets avaient été trouvés par le sauvage. Avait-il été tué par lui, comme l’avait tenté Sewi-Sawa, ou bien son histoire était-elle bien véritable ?

Les autorités furent averties, mais l’enquête ne dévoila rien qui pût jeter la moindre lueur d’espérance de retrouver Jacques.

Le curé était tout surpris du courage de sa protégée.

— Je ne m’attendais pas à vous trouver si raisonnable, Angéline ! lui dit tout simplement le curé, un peu embarrassé par son attitude calme.

— Mes yeux ont tant pleuré, que la source des larmes doit être tarie, Monsieur le Curé ; j’ai bu le calice jusqu’à la lie, il ne me reste plus qu’à gravir mon calvaire à l’exemple de mon Sauveur et je ne demande qu’une chose, c’est d’espérer revoir Jacques au ciel.

— Ah ! pour cela je le veux bien ; mais il n’y a pas de « presse », et vous pourrez encore rendre de grands services quand votre santé sera rétablie.

— Voulez-vous me remettre ces objets, Monsieur le Curé ? En les recevant de votre main, je consomme en quelque sorte mes épousailles, car c’est un peu de lui-même que je recevrai de vos mains, comme j’en aurais reçu l’époux que je m’étais choisi. Un peu de sa belle âme doit avoir laissé son empreinte sur l’hélice de son avion, qui l’avait si souvent transporté à travers l’espace. Ces objets me sont plus précieux que l’or accumulé dans notre cave et dont je ne sais maintenant trop que faire.

— En effet, cette fortune ne vous appartient pas ?

— Alors guidez-moi, Monsieur le Curé ?

— Il faudra en avertir son père, car il doit aussi ignorer le triste sort arrivé à son fils ; sans quoi, il aurait certainement donné de ses nouvelles.