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je commence à songer à mon avenir aussi, dit-il d’un air hésitant.

— En effet, Jean-Baptiste, il est temps d’y penser. Songerais-tu à te marier bientôt ?

Jean-Baptiste faillit s’évanouir à cette question inattendue.

— « Si », Mademoiselle Angéline, mais il faut commencer par trouver.

— Ça ne doit pas être Baptiste Benoit qui est en peine de trouver femme ! Tu as la réputation d’être un bon travailleur ! On dit même dans le village que tu dames le pion aux vieux pêcheurs, ce qui n’est pas à ton désavantage !

— Vous savez ça ? reprit-il d’un air joyeux.

— Mais, tout le monde le sait ! C’est un secret de polichinelle. N’est-ce pas vrai que tu as rapporté l’autre jour, à toi seul, deux quintaux de morues dans une seule journée ?

— Qui vous a dit cela, Mademoiselle ?

— Mais c’est mon père qui m’a dit cela en louant ta vaillance et ton adresse.

— En effet, Mademoiselle, j’aime le travail ! Surtout quand ça réussit. Mais je vous avoue que l’année dernière c’était pas mal décourageant de partir pour la pêche aux petites heures et, rendu au large, de se trouver en face d’un banc de marsouins ; mais cette année on y va le cœur plus gai.

— Le capitaine nous a sauvé la vie, dit Angéline ; avec les idées de Monsieur le Curé qui a toujours un tour nouveau dans son sac.

— Il paraît, Angéline, que tu n’es pas tout à fait étrangère au succès du capitaine, puisque le curé dit que c’est Notre-Dame de la Garde qui l’a inspiré et que c’est toi qui a inspiré Notre-Dame de la Garde.

Angéline, s’apercevant que ce pauvre Jean-Baptiste parlait sans trop se rendre compte de ce qu’il disait, éclata de son franc rire qui désarmait immédiatement ceux qui tentaient de lui faire la cour. Elle continua tout de même la conversation.