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des patriotes doit-il donc impunément couler pour satisfaire l’orgueil et l’ambition du château perfide des Tuileries ? Si le roi n’agit pas, suspendez-le : un seul homme ne peut pas entraver la volonté de vingt-cinq millions d’hommes. Si par égard nous le maintenons à son poste, c’est à condition qu’il le remplisse constitutionnellement ! S’il s’en écarte, il n’est plus rien !… Et la haute cour d’Orléans, que fait-elle ? poursuit Huguenin ; où sont les têtes des coupables qu’elle devait frapper ?… Nous forcera-t-on à reprendre nous-mêmes le glaive ?… »

Ces paroles sinistres consternent les constitutionnels et font sourire les Girondins. Le président cependant répond avec une fermeté qui n’est pas soutenue par l’attitude de ses collègues. Ils décident que le peuple des faubourgs sera admis à défiler en armes dans la salle.


XV

Aussitôt après le vote de ce décret, les portes, assiégées par la multitude, s’ouvrent et livrent passage aux trente mille pétitionnaires. Pendant ce long défilé, la musique fait entendre les airs démagogiques de la Carmagnole et du Ça ira, ces pas de charge des émeutes. Des femmes armées de sabres les brandissent vers les tribunes, qui battent des mains ; elles dansent devant une table de pierre où sont inscrits les droits de l’homme, comme les Israélites autour du tabernacle. Les mêmes drapeaux, les mêmes inscriptions