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la fureur de leurs ennemis. La nuit tombe. Le concierge de l’hôtel, qui seul a le secret de leur fuite, leur apporte des aliments et des couvertures ; il réchauffe leurs membres engourdis par le froid et par l’humidité de ces voûtes glacées ; il leur procure des vêtements moins suspects ; il coupe leurs cheveux et leurs moustaches. Ils sortent un à un sous ces déguisements.

Soixante autres qui se retiraient en bon ordre, sous le commandement de quatre officiers, à travers les Champs-Élysées, se dirigeant sur leur caserne de Courbevoie, sont enveloppés par la gendarmerie et ramenés à l’hôtel de ville. Arrivés sur la place de Grève, leur escorte les massacre, jusqu’au dernier, aux acclamations du peuple et sous les yeux du conseil de la commune.

Trente hommes, commandés par M. de Forestier de Saint-Venant, jeune officier suisse à peine adolescent, sont cernés de toutes parts sur la place Louis XV. Sûrs de mourir, ils veulent du moins venger leur sang. Ils chargent à la baïonnette le poste de gendarmerie et de canonniers qui entoure la statue de Louis XV, au milieu de la place. Trois fois ils enfoncent ce poste. Trois fois des renforts y arrivent et cernent de plus près ces trente hommes. Ils tombent un à un, décimés lentement par le feu qui les enveloppe. Réduits au nombre de dix, ils parviennent à forcer le passage, se jettent dans les Champs-Élysées et combattent, d’arbre en arbre, jusqu’à la mort. M. de Forestier, seul survivant et sans blessure, est près d’escalader la muraille d’un jardin ; un gendarme à cheval franchit le fossé qui sépare la promenade de la chaussée et le renverse mort d’un coup de carabine dans les reins.

Le jeune Charles d’Autichamp, sortant du palais, et se