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le reconduisit triomphalement à sa demeure. Mais les sicaires à qui une main invisible avait désigné la victime frémissent de la voir échapper. Un serviteur expulsé ameute contre son ancien maître un rassemblement de forcenés. En vain M. de Clermont-Tonnerre, monté sur une borne, harangue avec sang-froid ses assassins : un coup de feu qu’il reçoit au visage étouffe sa parole dans son sang. Il se précipite dans un hôtel ouvert de la rue de Vaugirard et monte jusqu’au quatrième étage ; ses meurtriers le suivent, l’égorgent sur l’escalier, le traînent sanglant dans la rue, et n’abandonnent qu’un cadavre à ses amis consternés. Défiguré, mutilé, dépecé par les armes ignobles qui souillent ce qu’elles tuent, sa jeune femme ne reconnaît le corps de son mari qu’à ses vêtements.


XXII

Le combat à peine terminé, Westermann, couvert de poudre et de sang, vint recevoir chez Danton les félicitations de son triomphe. Il était accompagné de quelques-uns des héros de cette journée. Danton les embrassa. Brune, Robert, Camille Desmoulins, Marat, Fabre d’Églantine, coururent l’un après l’autre embrasser leur chef, et recevoir les nouveaux mots d’ordre pour la soirée. Les femmes pleuraient de joie en revoyant vainqueurs leurs maris, qu’elles avaient crus immolés par le canon des