Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/134

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Les frissons de la mort sur ses tempes glissèrent,
Et de haine assouvis les tigres le laissèrent.

Aux cris de ton Cédar sous la fronde abattu,
Pauvre vierge enchaînée, hélas ! que faisais-tu ?
Sans oser réveiller sa mère qui sommeille,
Chaque insulte arrivait de loin à son oreille :
La raillerie amère et l’outrageux affront
La meurtrissaient au cœur et lui montaient au front ;
Son âme bondissait dans son sein, de colère,
Comme un fruit qui remue au ventre de sa mère ;
Chaque coup que la roche entendait retentir,
Ses membres tressaillants croyaient le ressentir ;
Chaque élan que l’horreur donnait à sa poitrine,
D’une égale secousse ébranlait la racine :
Et ses cheveux aux rocs par sept nœuds attachés,
De secousse en secousse étaient presque arrachés.
Aux coups sourds, aux accents de cette voix plaintive,
Elle essayait en vain, de sa main convulsive,
De dénouer l’entrave où ses pas étaient pris ;
La sueur ruisselait de ses membres meurtris,
Et le nœud sous l’effort se serrait davantage.
Enfin, dans un moment de colère sauvage,
Comme un renard captif, par l’enfant entravé,
Qui lime avec ses dents l’anneau qu’on a rivé,
Rongeant entre ses dents sa noire chevelure,
Et de ses nœuds rompus déliée à mesure,
Elle coupa sa chaîne, et, s’élançant dehors,
Un sourd gémissement la guida près du corps.