Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/204

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Et des fruits inconnus de formes, de grosseurs,
Embaumaient l’air autour de diverses saveurs.


Pour la première fois ces fils de la nature,
Cédar et Daïdha, contemplaient la culture,
Et voyaient des forêts les trésors infinis
Sous la main dans un champ par l’homme réunis,
Comme dans le festin qu’on prépare au convive
La table réunit les dons de chaque rive ;
Ces fruits, qu’on ne cueillait qu’en errant dans le bois,
À leur main sans effort s’offraient tous à la fois ;
Les branches fléchissaient sous les cônes énormes ;
La greffe avait doublé les saveurs et les formes ;
Et d’admiration surpris à chaque pas,
Cédar les revoyant ne les connaissait pas.
Nul arbre parasite à leurs rameaux fertiles
N’enlaçait au hasard ses branchages stériles ;
De distance en distance ils croissaient isolés
Sur un champ où la brise ondoyait dans les blés ;
Les épis presque mûrs bruissaient sur leur paille,
Comme des feuilles d’or qu’un lamineur travaille.


Le vieillard, sous ses doigts broyant l’or du froment,
En fit sortir le suc comme un lait écumant :
« C’est ce lait, leur dit-il, dont la glèbe féconde
Nourrit dans les cités les grands peuples du monde. »
Et sous la pierre ronde en écrasant le grain,
Sa voix leur expliqua la merveille du pain.