Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/421

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Essuyait de son front la sueur goutte à goutte,
Et son souffle d’amour rafraîchissait la route.
Quand le couple enfantin s’éveillait ou criait,
Dans le creux de sa main, que leur lèvre essuyait,
Cédar, faisant un peu ruisseler l’outre pleine,
Du vent sur leur visage en humectait l’haleine.
Ainsi, cherchant l’abri d’un Dieu juste et vengeur,
Fuyait vers l’Orient le couple voyageur ;
Et chacun de leurs pas, rapprochant l’espérance,
Semblait jeter un siècle entre eux et leur souffrance !
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Ils marchèrent ainsi jusqu’au pâle matin.
Déjà le grand désert, rougissant le lointain,
Comme une flamme envoie un reflet au nuage,
Incendiait le ciel de sa livide image.
La vapeur que la nuit lui faisait exhaler
Aux rayons bas du ciel paraissait onduler.
Les sillons sablonneux fumaient comme une braise
Que la pelle remue aux bords de la fournaise.
Tout l’horizon flottait dans la confusion.
Seulement, par moments, un oblique rayon,
Rasant du sable d’or la crête qu’il allume,
Le faisait éclater comme un bouillon d’écume ;
Puis, d’un sommet à l’autre avec le jour glissant,
Semait de points de feu le sol éblouissant,
Et, noyant le regard dans des horizons vagues,
De cette mer de flamme entre-croisait les vagues.
En entrant sous ce ciel par la vapeur terni,
On croyait tout vivant entrer dans l’infini.