Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 29.djvu/276

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l’embellir mille fois plus à mes yeux. Mais sa beauté ressemblait presque à une torture. C’était comme une figure de ces jeunes vierges du Corrège clouées au poteau sur le bûcher de leur martyre et se tordant dans leurs liens pour échapper aux regards qui profanent leur pudicité. Hélas ! c’était un martyre aussi pour la pauvre Graziella. Mais ce n’était pas, comme on eût pu croire en la voyant, le martyre de la vanité. C’était le martyre de son amour.

Les habillements de la jeune pensionnaire française du couvent dont on l’avait vêtue, coupés sans doute pour la taille maigre et pour les bras et les épaules grêles d’une enfant cloîtrée de treize à quatorze ans, s’étaient rencontrés trop étroits pour la stature découplée et pour les épaules arrondies et fortement nouées au corps de cette belle fille du soleil et de la mer. La robe éclatait de partout sur les épaules, sur le sein, autour de la ceinture, comme une écorce de sycomore qui se déchire sur les branches de l’arbre aux fortes sèves du printemps. Les jeunes couturières avaient eu beau épingler ça et là la robe et le fichu, la nature avait rompu l’étoffe à chaque mouvement. On voyait en plusieurs endroits, à travers les déchirures de la soie, le nu du cou ou des bras éclater sous les reprises. La grosse toile de la chemise passait à travers les efforts de la robe et du fichu et contrastait par sa rudesse avec l’élégance de la soie. Les bras, mal contenus par une manche étroite et courte, sortaient comme le papillon rose de la chrysalide qu’il fait gonfler et crever. Ses pieds, accoutumés à être nus ou à s’emboîter dans de larges babouches grecques, tordaient le satin des souliers qui semblaient l’emprisonner dans des entraves de cordons noués comme des sandales autour de ses jambes. Ses cheveux, mal relevés