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les montagnes, ou en barque sur le lac. J’avais envoyé acheter un habit et un peu de linge à Genève. On me présenta chez quelques amis dans les environs. Comme ces dames me voyaient souvent écrire ou crayonner, elles me demandèrent quelques confidences de mes rêveries. Je leur lus une ode à la liberté de l’Europe et quelques stances sur les Alpes, qui leur parurent supérieures à l’idée qu’elles se faisaient sans doute des talents d’un si jeune hôte. Elles me prièrent de les relire à M. de Vincy, qui m’embrassa d’attendrissement aux accents d’indépendance pour sa patrie et aux imprécations contre la tyrannie de l’empire. Il ne voulait pas croire que ces vers fussent de moi. Je fus obligé, pour le convaincre, d’en écrire quelques strophes de plus sous ses yeux et sur des idées données par lui.

De ce jour, l’indulgence de cette noble famille s’augmenta beaucoup pour moi, mais non ses bontés. Je vivais aimé et heureux dans cette maison patriarcale, où la piété, la vie cachée et la charité de mes hôtes me rappelaient la maison de ma mère. Nous passions les soirées sur une longue et large terrasse qui s’étend au pied du château, et d’où l’on domine le bassin du lac, à causer des événements du temps, et à contempler les scènes calmes et splendides où la lune promenait ses lueurs au-dessus des eaux et des neiges.


VIII


On apercevait de là les cimes des arbres du parc et les toits des pavillons du château de Coppet qu’habitait alors, sous les traits d’une femme, le génie qui éblouis-