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L’exemple de cette résignation calme et sereine à la mort que lui donnait tous les jours sa mère l’avait lui-même résigné à la vie. La piété n’avait pas persuadé, mais elle avait attendri son âme. Ce Dieu qu’il ne voyait pas encore, il le sentait et l’entendait en lui. Il avait prié pour la première fois et des milliers de fois au pied de ce lit de souffrance et de paix. Il s’était fait de la religion de sa mère pour prier.dans la même langue. Elle avait langui deux ans, elle avait expiré en lui léguant pour tout héritage sa religion. Il lui avait juré, à l’heure où les paroles sont sacrées, d’accepter ce legs de son âme. Il tenait son serment. Sa religion c’était sa mère ; sa conviction c’était sa promesse ; sa foi c’était son souvenir.


XXVI


Cependant ces deux années d’études tronquées et de carrière interrompue avaient bouleversé tout son avenir. Son ambition était ensevelie sous la pierre du tombeau de sa mère, dans le cimetière de Servolex. Sa santé s’était altérée par l’isolement et par la tristesse. Ses nerfs, tendus trop jeunes par la pensée et par la douleur, s’étaient brisés. Une mélancolie sereine, mais profonde et incurable, assombrissait tout l’horizon pour lui. Les hommes et leurs pensées courtes comme eux lui faisaient pitié. Rien ne valait la peine de rien.

Il avait renoncé résolument at toute carrière. Il avait pris le parti de vivre seul avec sa sœur, jeune personne digne de lui, dans leur pauvre domaine de Servolex. Il possédait à peu près trente mille francs en vignes, en bois et en terres autour de la maison, dont le revenu suf-