Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 29.djvu/352

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


IX


Bientôt nous ne nous contentâmes plus de ces rencontres fortuites dans les chemins des deux hameaux. Il vint chez moi, j’allai chez lui. Il n’y avait entre sa maison et celle de mon père qu’une colline peu élevée à monter et il descendre. Au bas de cette colline, cultivée en vignes rampantes, on trouvait une fontaine sous des saules et un sentier creux entre deux haies qui traversait des prés.

Au bout de ces prés, une petite porte fermée par un verrou donnait accès dans un jardin potager entouré de murs tapissés d’espaliers. A l’extrémité de ce jardin, une maison basse et longue avec une galerie extérieure dont le toit portait sur des piliers de bois. Une petite cour entourée d’un hangar, d’un four et d’un bûcher. Sur le mur d’appui de la galerie, deux beaux chiens couchés et hurlant quand on ouvrait la porte. Quelques pots de réséda et des fleurs rares sur le palier. Quelques poules dans la cour, quelques pigeons sur le toit. C’était le presbytère.

Du côté opposé au jardin, la maison donnait sur le cimetière, vert comme un pré mal nivelé autour de l’église. Par-dessus le cimetière, le regard s’étendait par une échappée de vue sur des flancs de montagnes incultes entrecoupées de hauts châtaigniers. L’œil glissait ensuite obliquement sur une sombre et noire vallée qui se perdait l’été dans la vapeur chaude du soleil, l’hiver dans la fumée du brouillard ou des eaux. Le son de la cloche qui tintait, aux trois parties du jour, aux baptêmes et aux sépultures, les pas des paysans revenant de