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d’années que lui, je me prêtais davantage à ces séductions de la religion de mon enfance et de ma mère. La piété me revenait dans la solitude ; elle m’a toujours amélioré, comme si la pensée de l’homme isolé du monde était sa meilleure conseillère. Je ne croyais pas de l’esprit, mais je voulais croire du cœur. Le vide qu’avait creusé dans mon âme ma foi d’enfant, en s’évaporant dans les dissipations de ces années de repentir et de tristesse, me semblait délicieusement comblé par ce sentiment d’amour divin qui se réchauffait sous la cendre de mes premiers égarements, et qui me purifiait en me consolant. La poésie et la tendresse de la religion étaient pour moi comme ces deux saintes femmes assises sur le sépulcre du Sauveur des hommes et à qui les anges disaient en vain : « Il n’est plus là. »


XVI


Je m’obstinais à retrouver la croyance de ma jeunesse où j’avais eu celle de mon enfance. J’aimais le recueillement et l’ombre de ces petites églises de campagne où le peuple se rassemble et s’agenouille, pour se consoler, aux pieds d’un Dieu de chair et de sang comme lui. L’incommensurable espace entre l’homme et le Dieu sans forme, sans nom et sans ombre, me semblait comblé par ce mystère d’incarnation. Si je ne l’admettais pas tout à fait comme vérité, je l’adorais comme poème merveilleux de l’âme. Je l’embellissais de tous les prestiges de mon imagination. Je l’embaumais de tous mes désirs. Je le colorais de toutes les teintes de ma pensée et de mon enthousiasme. Je subordonnais ma raison re-