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entres dans une bonne famille : le bon Dieu te devait ça pour toutes les peines que tu t’es données avec ta mère. Elle sera bien contente, dans le paradis, de te savoir établie avec un si beau, si riche et si honnête garçon. » Moi, j’écoutais tout cela, et je songeais à me faire la plus belle que je pourrais le jour de nos fiançailles, pour faire honneur à Cyprien.


XXIX


« J’avais amassé une petite économie en petites pièces, après avoir vécu et payé l’apprentíssage de la petite chez la dentellière ; j’avais mis cela dans le coffre à sel, à côté de notre lit. Je me dis : « Il faut acheter du linge, une robe neuve, une coiffe, des souliers de peau de chèvre et une bague d’or pour Cyprien, des boîtes de dragées pour les parents et les voisines. » Je dépensai tout à me faire un trousseau, puisque ma mère n’avait pas pu m’en faire un avant de mourir. Mais aussi, j’étais aussi bien nippée qu’une fille qui aurait eu père et mère. Tout cela était étalé sur le coffre à sel, à la tête du lit. J’y allais bien vingt fois par jour pour le regarder et pour me dire : « À quoi ressembleras-tu, Geneviève, quand tu seras là-dedans ? Vraiment, monsieur, je n’osais pas l’essayer, tant j’avais peur de ne pas me reconnaître. J’aurais rougi de me parer ainsi, même devant la petite Josette.

« À la fin, il fallut bien m’endimancher, car c’était le matin du jour où Cyprien devait venir me prendre pour les fiançailles. Je menai Josette de grand matin chez sa maîtresse, je priai cette femme de la garder deux jours et de la faire coucher avec ses enfants. Je lui recomman-