Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 30.djvu/289

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pleuraient tous ! ils lui déboutonnaient sa veste, ils lui enlevaient son casque tout bossué, ils lui ôtaient sa cravate, ils lui ouvraient sa chemise sur la poitrine, du linge superbe ! monsieur ; ils lui jetaient de l’eau sur son visage pâle, ils couraient chercher le chirurgien-major, que ça faisait la chair de poule à Josette et à moi. Le chirurgien-major accourut, il lui tâta le pouls, il dit : « Ça n’est rien ; portez le maréchal des logis, bien doucement, dans cette maison, sur un lit ; je vais le panser. »

« Je n’osais pas le dire de peur de faire affront aux soldats ; mais j’en fus bien aise et Josette aussi ; ç’aurait été notre frère que nous n’aurions pas été plus tristes de la chute, de l’évanouissement, de la pâleur et du sang de ce beau jeune militaire. Nous ouvrîmes la porte de notre chambre, et deux cavaliers le portèrent sur le lit. « Ça ne sera qu’une paire de draps à changer, » dis-je à Josette. Nous nous retirâmes toutes tremblantes dans la boutique pendant le pansement. Nous écoutions pourtant à la porte, et quand nous entendîmes respirer et dire au chirurgien major : où suis-je ? » nous entendîmes aussi le chirurgien major lui répondre : « Chez de braves femmes, mon cher Septime ! (Il s’appelait Septime de ***.) Restez-y quelques jours ; vous avez l’épaule démise et quelques égratignures à la tête, avec un peu d’ébranlement qu’il faut calmer par une immobilité complète. Il y aurait danger à vous transporter en ce moment ; mais dans quinze jours vous serez à cheval. Je vais faire mon rapport. Adieu ! »

« Il vint me prier d’éviter tout bruit au malade et me défendre de lui donner autre chose que de l’eau avec quelques gouttes d’une liqueur qu’il me laissa. Je me sentais portée de cœur à soigner ce jeune homme que la Providence m’avait envoyé. Je dis à Josette : « Tu iras coucher chez ta tante Mariette, avec ta cousine ; moi, je resterai à la mai-