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bois de lits couverts de leurs paillasses et de quelques chaises. La porte seule donnait de l’air à ce logement brûlant, échauffé par les vapeurs âcres de l’écurie qui était au-dessous. Une lanterne de roulier, suspendue au plancher par une corde et où brûlait un morceau de suif, éclairait les grabats. Ils étaient tous vides, à l’exception du dernier contre la cloison du fenil. La lueur de la lanterne éclairait sur ce lit les formes d’un corps sous la couverture, et la tête pâle du pauvre malade sur le traversin.

« C’est moi, père ! cria l’enfant en se précipitant vers le lit et en jetant ses petits bras au cou du mourant.

« — Ah ! c’est toi, répondit-il d’une voix éteinte par le mal et qui semblait se réveiller du fond d’un rêve de fièvre ; et où est Luce ? Est-ce que tu n’as pas su retrouver ton chemin ?

« — Luce vient demain sur un mulet, avec un homme de Valneige, qui est allé la chercher de la part d’un monsieur et d’une demoiselle qui sont bien bons pour le pauvre monde et qui m’ont ramené sur un beau cheval à Voiron, pour avoir soin de toi. »

L’enfant raconta alors en peu de mots tout ce qui s’était passé à l’hospice de Valneige, la veille et la nuit dernière, sans parler néanmoins de la découverte de ses cheveux et de l’effet de sa ressemblance avec la sœur de la servante. Puis il fit signe à Geneviève et à moi de s’approcher du lit, et il dit à son père : « Voilà la dame et voilà le monsieur. »

Le malade chercha à se soulever sur son coude affaibli, et se confondit en remercîments et en étonnements sur tant de bontés que des personnes étrangères avaient pour son enfant, pour sa femme et pour un pauvre homme comme lui. Nous lui défendîmes de parler de reconnaissance avant qu’il fût bien guéri. Geneviève, après avoir fait rafraîchir l’enfant, se mit à balayer et à laver le plancher