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Jean luttait contre la mort. Geneviève eut deux personnes à soigner au lieu d’une. Elle suffisait à tout, passant du chevet de Jean au chevet de Luce, avec l’enfant qui l’aidait et qui s’attachait d’heure en heure à elle de toute la tendresse qu’il avait pour Luce et pour Jean. Il n’avait rien compris à la scène du notaire et du testament. On lui aurait dit mille fois que Luce et Jean n’étaient pas son père et sa mère, que son cœur lui aurait toujours dit plus fort qu’il était leur enfant.


CL


Trois jours se passèrent ainsi sans qu’il y eût aucun changement dans l’état du pauvre magnien. Sa femme, soulagée du poids de sa conscience, ne tarda pas à se rétablir. La lenteur du mal commençait à lui rendre l’espérance de voir son mari rendu par Dieu à son amour. Le médecin lui-même trouvait des symptômes plus rassurants. Il y avait dans la chambre habitée par les quatre pauvres gens des heures de silence et de calme pendant lesquelles on n’entendait que la respiration plus douce et plus régulière de Jean assoupi. Les deux femmes, qui ne se quittaient plus, causaient alors à voix basse auprès de la fenêtre. L’enfant jouait ou travaillait avec les outils de Jean sur le palier. Geneviève s’introduisait de plus en plus dans le cœur et dans la confiance de Luce. Depuis que cette jeune femme avait jeté le cri de sa conscience devant le notaire, Geneviève semblait l’aimer davantage. Elle ne la perdait pas un moment de vue, comme on surveille de l’œil un trésor ou un mystère qu’on craint de voir disparaître avec la personne qui en est dépositaire et qui em-