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ACTE II, SCÈNE II

L’autre, Isaac, son frère, on aurait dit sa sœur,
Pauvre enfant, d’une femme il avait la douceur !
Il embrassait son père avec tant de tendresse
Que Toussaint se sentait fondre sous sa caresse,
Il disait à l’enfant souriant dans ses bras :
« Albert sera ma gloire et toi tu m’aimeras. »

Avec attendrissement.

Pauvres petits, hélas ! qu’ont-ils fait de leur grâce ?
Il me semble les voir et que je les embrasse.

En étendant les bras.

Isaac ! mon Albert !… Pardon, je les aimais
Comme un père… Oh ! Toussaint, les verras-tu jamais !


À ces mots, Albert croit reconnaître l’accent de son père ; il se lève comme en sursaut de la table où il était accoudé, la tête sur ses mains, et fait un mouvement instinctif comme pour répondre et pour s’élancer.
albert.

Je croirais, si la vue aux sons était pareille,
Que la voix de mon père a frappé mon oreille…

isaac, s’approchant de Toussaint.

Vous nous connaissez donc ?

salvador, aux enfants.

Silence ! ou parlez bas.

toussaint, ouvrant convulsivement ses bras à Isaac pour l’embrasser et les refermant soudain par réflexion.

Qu’avez-vous dit ?… Moi !… Vous !… Je ne vous connais pas.

leclerc, à Salvador.

Écartez cet enfant qui trouble sa réponse.

On écarte un peu l’enfant.

Du retour de ses fils s’il recevait l’annonce ;
Si, pour prix de la paix rendue à ces climats,
La France remettait ses enfants dans ses bras,
Mettrait-il en balance, à ce don d’une mère,
L’ambition du chef et le bonheur du père ?