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cinquième époque.


Des choses d’ici-bas divin enchaînement !
Par quel simple ressort la main de Dieu dirige
Ce sort, où l’œil ne voit que hasard et prodige !


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Un pauvre Savoyard, dans la froide saison,
Descend de son chalet et sert dans la prison,
Porte l’eau, fend le bois ; des guichetiers sévères
Prend, pour les adoucir, tous les durs ministères ;
Et quand il a trempé la soupe au prisonnier,
Revient, le cœur content, dormir dans son grenier.
Cet homme est le neveu du seul berger qui sache
Le mystère profond de l’antre qui nous cache.
Il monte à son village, il dit au vieux berger
Que l’évêque est captif, et qu’on va le juger ;
Qu’il lui parle souvent ; que sa main enchaînée
S’abaisse tous les jours sur sa tête inclinée ;
Qu’il attend sa couronne avec sérénité,
Comme un juste qui voit du cœur l’éternité ;
Qu’il ne demande pas grâce aux bourreaux d’une heure ;
Qu’il n’a qu’un seul désir, revoir avant qu’il meure
Un des fils que sa main devait sanctifier ;
Qu’il a quelque secret divin à confier ;
Qu’il en nomme souvent un d’un accent plus tendre,
Jocelyn, le plus jeune. Oh ! s’il pouvait l’entendre,
Oh ! celui-là, du moins, ne le laisserait pas
Monter sans une main les marches du trépas !