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cinquième époque.

» Risible enfantillage et des sens et du cœur,
» Voilà ce qui du ciel en vous serait vainqueur ?
» Voilà pour quel appât, voilà pour quelle cause
» Vous trahiriez le vœu que ce temps vous impose ?
» Vous laisseriez ma mort sans secours, sans adieu,
» Le temple sans ministre, et le monde sans Dieu ?
» Je ne me doutais pas que dans ces jours sinistres
» Où l’autel est lavé du sang de ses ministres,
» Pendant que des cachots chacun d’eux comme moi
» S’élance à l’échafaud pour confesser sa foi,
» Pendant que l’univers avec horreur admire
» La bataille de sang du juge et du martyre,
» Attendant pour savoir à quoi fixer son cœur,
» Des bourreaux ou de nous qui restera vainqueur ;
» Je ne me doutais pas qu’un des soldats du temple,
» Du lévite autrefois la lumière et l’exemple,
» Au grand combat de Dieu refusant son secours,
» Amollissait son âme à de folles amours ;
» Au pied des échafauds où périssaient ses frères,
» Sacrifiait au Dieu des femmes étrangères,
» Pensant sous quels débris des temples du Seigneur
» Il cacherait sa couche avec son déshonneur !
» — Ô mon père, pitié ! Quel mot osez-vous dire ?
» Le ciel sait si mon cœur a tremblé du martyre ;
» Il sait si j’hésitai, pour arriver à vous,
» D’affronter cette mort dont je serais jaloux ;
» Mais, ébloui de zèle, et moins homme qu’apôtre,
» Vous ne jugez, hélas ! nos cœurs que par le vôtre ;
» Vous croyez que mon cœur, de l’amour triomphant,
» N’arracherait qu’un rêve au sein de cet enfant,
» Que le sien m’oublîrait ; que je pourrais moi-même
» Rapporter aux autels tout l’amour dont je l’aime ;
» Absous par votre main d’un parjure innocent,
» Noyer son souvenir dans des pleurs ou du sang ;