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jocelyn.

19 juillet 1800.

C’en est donc fait ! ma mère… Ah ! ce dernier effort
De sa vie expirante a brisé le ressort !
Ô nuit de l’agonie et de la délivrance,
Écris-toi dans mon âme en larmes d’espérance !
Je veillais, en priant, seul, au bord de son lit.
L’étoile du matin parut ; elle me dit :
« Courage, mon enfant ! Je sens que je vous quitte ;
» De ses derniers élans mon cœur pour vous palpite ;
» Avant que cette étoile ait pâli dans le jour,
» Je vous embrasserai de l’éternel séjour !
» Oh ! réjouissez-vous, les vrais jours vont m’éclore.
» Pourtant sur cette terre embrassons-nous encore :
» Va réveiller ta sœur !… Non, Dieu me le défend.
» Écoute : dans son sein elle porte un enfant.
» Cette heure d’agonie à voir est trop cruelle :
» Il faut la lui sauver pour son fruit et pour elle ;
» Il faut laisser ce voile entre elle et le trépas ;
» Et mon dernier baiser, tu le lui donneras !
» Tu sais quels saints devoirs ce grand moment réclame :
» Accomplis-les, mon fils, je te livre mon âme !
» Va, tu n’es plus pour moi que le prêtre de Dieu. »


Que béni soit Celui qui du suprême adieu
M’adoucit à ce point l’heure toujours amère,
Et fait ouvrir le ciel par le fils à la mère !