Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 4.djvu/333

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
332
jocelyn.

» Que tu ne peux combler qu’à force de vertu :
» C’est moi qui l’ai creusé ; dis, me pardonnes-tu ? »
Je collai sur ses mains mes lèvres en silence.
« Oh ! que ma douce mort te soit ta récompense !
» Je t’ai fermé le monde, et c’est toi dont la main
» Du ciel ouvert par toi m’aplanit le chemin !
» Je vais t’y préparer, dit-elle, une demeure
» Plus durable, à mon tour, ô mon fils, et meilleure !
» Ici le cœur tarit, les longs bonheurs sont courts :
» Ton âme a sa patrie où l’on aime toujours ! »
Puis sentant que la mort affaissait ses paupières :
« Récite-moi, mon fils, ces divines prières
» Qui de l’âme fidèle accompagnent l’essor,
» Afin qu’en expirant elle bénisse encor. »
J’obéis ; sous mes pleurs je lui lus, dans ses Heures,
La tristesse de l’âme à ses dernières heures :
Ses lèvres, dont l’accent paraissait s’assoupir,
Murmuraient les répons de ce pieux soupir,
Comme l’écho lointain d’une voix affaiblie
Qui s’éloigne, et déjà répond de l’autre vie.
Tout à coup au refrain je ne l’entendis plus,
Elle achevait au ciel les chants interrompus !…
Le livre s’échappa de mes mains, qui s’ouvrirent,
Et l’hymne de la mort… mes sanglots le finirent.