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jocelyn.

Qu’un peu d’argile ici sur l’argile jeté
N’ensevelit pas l’âme et l’immortalité ?
Que la vie, un moment détournée en sa course,
Ne s’anéantit pas en montant à sa source,
Ainsi que le rayon qui s’enfuit de nos yeux
Ne s’éteint pas là-haut en remontant aux cieux ?
Non ! tu vis, tu m’entends, tu me réponds, tu m’aimes ;
Nos places ont changé, nos rapports sont les mêmes.
Âme qui fus ma mère, oh ! parle, parle-moi !
Ma conversation est au ciel avec toi.


Seulement ici-bas, séparés par l’absence,
Nos cœurs qui se cherchaient souffraient de la distance ;
Tu m’entends maintenant de partout ; ton regard
Ne connaît plus ni lieu, ni retour, ni départ ;
Ton amour ne tient plus dans ce doux cœur de femme,
Mais comme une atmosphère enveloppe mon âme !…
Aussi sur ce gazon mouillé de mes regrets
Si je viens dans la nuit te pleurer de plus près,
Ce n’est pas que mon cœur rêve que cette cendre
Se réchauffe à mon souffle et puisse mieux m’entendre :
Non, c’est l’aveugle instinct de la tendre douleur
Qui mène à notre insu les pieds où va le cœur,
Et, dans l’illusion que le regret embrasse,
Nous fait chercher encor le pas où fut la trace.

. . . . . . . . . . . . . . .

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Oh ! coulez ! oh ! coulez ! Mon cœur, épanche-toi !
Ô terre, bois mes pleurs ! ces pleurs, c’est encor moi !