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neuvième époque.

Il est ouvert, il fume encore
Sur le sol, ce profond dessin !
Ô terre, tu vis tout éclore
Du premier sillon de ton sein !
Il fut un Éden sans culture :
Mais il semble que la nature,
Cherchant à l’homme un aiguillon,
Ait enfoui pour lui sous terre
Sa destinée et son mystère,
Cachés dans son premier sillon.


Oh ! le premier jour où la plaine,
S’entr’ouvrant sous sa forte main,
But la sainte sueur humaine
Et reçut en dépôt le grain ;
Pour voir la noble créature
Aider Dieu, servir la nature,
Le ciel ouvert roula son pli,
Les fibres du sol palpitèrent,
Et les anges surpris chantèrent
Le second prodige accompli !


Et les hommes ravis lièrent
Au timon les bœufs accouplés,
Et les coteaux multiplièrent
Les grands peuples comme les blés ;
Et les villes, ruches trop pleines,
Débordèrent au sein des plaines ;
Et les vaisseaux, grands alcyons,
Comme à leurs nids les hirondelles,
Portèrent sur leurs larges ailes
Leur nourriture aux nations !