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jocelyn.

Et, pour combler le fisc d’une oisive opulence,
Jetaient l’or ou le fer dans la sainte balance
          Où Jésus avait mis ses poids ;


Lorsque, dans leurs palais regorgeant de délices,
Tout l’or des nations coulait avec leurs vices ;
Que le Tibre, souillé de profanations,
S’étonnait de revoir des mains sacerdotales
Mener le grand triomphe ou d’autres saturnales
          Sur les tombeaux des Scipions ;


Il était beau peut-être, avec Pétrarque ou Dante,
D’allumer son courroux comme une lampe ardente,
De jeter sur l’autel sa sinistre lueur,
Et, du temple avili déchirant les saints voiles,
De montrer sa souillure au soleil, aux étoiles,
          Et de crier sur lui : « Malheur ! »


Lorsque du cavalier la main rude et farouche
Tourmente un mors d’acier et fait saigner sa bouche,
L’obéissant coursier peut parfois tressaillir ;
Quand on souffle longtemps le charbon sous la vase,
L’eau dormante à la fin, comme un cœur qui s’embrase,
          Peut se soulever et bouillir.


Alors quelque péril honorait quelque audace ;
Alors le fer sacré, plus prompt que la menace,
Cimentait dans le sang le dogme universel ;
Ou l’interdit vengeur, ce Dieu tonnant de Rome,
Grondait sur le blasphème, arrachait l’homme à l’homme,
          Maudissait le pain et le sel !…