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FIOR D’ALIZA.

CXXXVIII

Je descendis d’abord comme un tourbillon de feuilles sous un vent d’hiver qui les roule de précipices en précipices, sans autre sentiment et sans autre idée que de me rapprocher d’Hyeronimo.

Puis, quand je n’entendis plus les cris de ma tante qui me rappelait, malgré le frère, à la cabane, et que je fus parvenue au bord de la plaine, où les passants et les chars de maïs commençaient à élever les bruits et la poussière du matin sur les routes des villages et des villas, je tombai plutôt que je ne m’assis sur le bord du sentier, à l’endroit ou il va se rejoindre aux grandes routes, sous le petit pont sans eau qui sert à passer le torrent pendant l’hiver pour aller de Lucques au palais de Saltochio.

Là, sans pouvoir être vue de personne, j’essuyai mon front tout mouillé de sueur, mes yeux obscurcis de larmes ; je repris mon haleine essoufflée et je me mis a réfléchir, trop tard, hélas ! à ce que j’allais faire, toute seule ainsi et toute perdue, dans les rues de la grande ville, d’où j’entendais déjà les cloches et les bruits formidables monter dans l’air avec le soleil du matin.

Oh ! Que j’avais peur, mon Dieu ! et que je sentais mon pauvre cœur devenir petit dans ma poitrine ! Car la soli-