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FIOR D’ALIZA.

— L’enfant est fatigué, dit tout le monde ; il faut lui faire place à l’ombre de la toile sur le plancher du chariot. Il est bien mince et les bœufs sont bien forts et bien nourris ; il n’y a pas de risque que son poids les fatigue ; puisqu’il va à Lucques et que nous y allons aussi, que nous en coûtera-t-il de le déposer sous la voûte du rempart ?

Monte, mon enfant, dit la fiancée, c’est une bénédiction du bon Dieu que de trouver une occasion de charité à la porte de la ville, un jour de noce et de joie, comme est ce beau jour pour nous.

— Monte, mon garçon, dit le fiancé en me soulevant dans ses bras forts et en me tendant à son père qui m’attira du haut du timon et qui me fit passer par-dessus les ridelles.

— Monte, jeune pifferaro, dirent-ils tous en me faisant place, il ne nous manquait qu’un ménétrier, dont nous n’avons point au village, pour jouer de la zampogne sur le devant du char de noces en rentrant en ville et en nous promenant dans les rues aux yeux ravis de la foule, tu nous en serviras quand tu seras rafraîchi ; et puis, a la nuit tombée, tu feras danser la noce chez la mère de la mariée, si tu sais aussi des airs de tarentelle, comme tu sais si bien des airs d’église.

Car ils m’avaient entendue, en s’approchant aux pas lents des bœufs, pendant que je jouais les dernières notes de ma litanie de douleur et d’amour, toute seule devant la niche du pont.