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CHAPITRE VI.

puis, s’il était mort, comment pourrais-je vivre moi-même ? Avons-nous jamais eu un souffle qui ne fût pas à nous deux ? Nos âmes ont-elles jamais été un seul jour plus séparées que nos corps ? Les balles qui frapperaient sa poitrine n’en briseraient-elles pas deux ?

Et puis enfin, ajoutai-je avec un rayon d’espérance dans le cœur, puisque la Providence a fait ce miracle, sur le pont de Saltochio, de me faire ramasser par cette noce, de me conduire juste, au pas de ces bœufs, chez le bargello où il respire, d’inspirer la bonne pensée de me prendre à leur service à ces braves gardiens de la prison, de me permettre ainsi de me faire entendre d’Hyeronimo avec l’assistance de notre zampogne, de le voir et de lui parler tant que je le voudrais, sans que personne soupçonne que je sais où il est, et que la clef de son cachot est dans les mains de celle qui lui rendrait le jour au prix de sa vie ; qui sait si cette Providence n’avait pas son dessein caché sous tant de protection visible ? et si…

CLXXXIX

La voix du paccinino interrompit ma pensée en me disant que c’était l’heure de porter la nourriture aux dogues du préau, de jeter des criblures de graines aux colombes du puits, et de renouveler l’eau dans les cruches