Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 5.djvu/274

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ir de rien, c’est les avilir. Il ne faut pas mettre le vin de Champagne dans le calice des holocaustes. On pense enchâsser ses larmes dans les vers, mais son rêve, non. Voilà pourquoi mes vers ont toujours été graves, souvent tristes, quelquefois pieux, jamais ou rarement légers. Mais je comprends cependant la conversation en vers ; et quand je n’aurai plus ni passions dans le cœur, ni aspirations élevées dans l’âme, ni idées dans la tête, ni larmes dans la mémoire, je reprendrai avec plaisir la causerie familière en vers souriants et indolents, sur le ton de cette lettre à Dumas.


VI

La vingt et unième poésie de ce recueil est adressée à M. Dargaud, traducteur de Job et historien de Marie Stuart, ami de la seconde époque de ma vie, et j’espère aussi de ma dernière. Cette méditation (car c’en est une, et une des plus inspirées) a été peu connue jusqu’à présent du public, parce qu’elle n’a été insérée que dans ce volume, publié presque sans retentissement dans un moment où l’esprit public était déjà distrait de la poésie par le pressentiment des révolutions prochaines. Néanmoins, si je faisais un choix parmi mes faibles œuvres, je conserverais ce cantique comme un des moins imparfaits. J’y retrouve toutes les grandes images que mon voyage en Judée a laissées dans mes yeux, toutes les voix du désert qu’il a laissées dans mon oreille. Pour comprendre le roi des poètes de l’âme, David, il faut avoir vu les sables désolés de Jéricho, les roch