Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 5.djvu/367

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Frère ! se disaient-ils, reconnais-tu la lame ?
Est-ce bien là l’éclair, l’eau, la trempe et le fil ?
Et l’acier qu’a fondu le même jet de flamme
Fibre à fibre se rejoint-il ? »

Et nous, nous vous disons : « O fils des mêmes plages !
Nous sommes un tronçon de ce glaive vainqueur ;
Regardez-nous aux yeux, aux cheveux, aux visages :
Mous reconnaissez-vous à la trempe du cœur ?…
N’est-ce pas cet œil bleu comme la mer profonde
Qui brise entre nos caps sur des écueils pareils,
Où notre ciel brumeux réfléchit dans son onde
Plus de foudres que de soleils ?

« Le vent ne fait-il pas battre sur vos épaules
Au branle de vos pas ces forêts de cheveux,
Crinière aux nœuds dorés du vieux lion des Gaules,
Où le soleil sanglant fait ondoyer ses feux ?
Ne résonnent-ils pas au souffle des tempêtes,
Comme ce crin épars par les lances porté,
Étendards naturels que font flotter nos têtes
Sur les clans de la liberté ?

« De nos robustes mains quand la paume vous serre.
Ce langage muet n’est-il pas un serment
Qui jure l’amitié, l’alliance ou la guerre,
Que nul revers ne lasse et nul jour ne dément ?
Nos langues, où le bruit de nos grèves domine.
Ne vibrent-elle pas rudes du même son.
Ainsi que deux métaux nés dans la même mine
Rendent l’accord à l’unisson ?