Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/244

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couleurs, encadrée dans le marbre et surmontée d’inscriptions arabes, était entourée d’esclaves noirs vêtus magnifiquement, armés de pistolets argentés, et de sabres de Damas étincelants d’or et de ciselures. Les vastes cours qui faisaient face au palais étaient remplies elles-mêmes d’une foule de serviteurs, de courtisans, de prêtres ou de soldats, sous tous les costumes variés et pittoresques que les six populations du Liban affectent : le Druze, le Chrétien, l’Arménien, le Grec, le Maronite, le Métualis. — Cinq à six cents chevaux arabes étaient attachés par les pieds et par la tête, à des cordes tendues qui traversaient les cours, sellés, bridés, et couverts de housses éclatantes de toutes les couleurs ; quelques groupes de chameaux, les uns couchés, les autres debout, d’autres à genoux pour se faire charger ou décharger ; et, sur la terrasse la plus élevée de la cour intérieure, quelques jeunes pages, courant à cheval les uns sur les autres, se lançaient le dgérid, s’évitaient en se couchant sur leurs chevaux, revenaient à toute bride sur leur adversaire désarmé, et faisaient, avec une grâce et une vigueur admirables, toutes les évolutions rapides que ce jeu militaire exige. — Après avoir contemplé quelques instants cette scène orientale, si nouvelle pour nous, nous nous approchâmes de la porte immense et massive de la première cour du palais, gardée par des Arabes armés de fusils et de longues lances légères, semblables à la tige d’un long roseau. — Là, nous envoyâmes porter au prince les lettres que nous avions pour lui. Peu d’instants après, il nous envoya son premier médecin, M. Bertrand, né en Syrie, d’une famille française, et ayant conservé encore la langue et le souvenir de sa patrie. — Il nous conduisit dans l’appartement que l’hospitalité de l’émir nous offrait, et des esclaves