Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/303

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charnées qu’on nous représente pour la terre promise, sur la foi de quelques écrivains prévenus ou de quelques voyageurs pressés d’arriver et d’écrire, qui n’ont vu, des domaines immenses et variés des douze tribus, que le sentier de roche qui mène, entre deux soleils, de Jaffa à Jérusalem. — Trompé par eux, je n’attendais que ce qu’ils décrivent, c’est-à-dire un pays sans étendue, sans horizon, sans vallées, sans plaines, sans arbres et sans eau : terre potelée de quelques monticules gris ou blancs, où l’Arabe voleur se cache dans l’ombre de quelques ravines pour dépouiller le passant ; — telle est, peut-être, la route de Jérusalem à Jaffa. — Mais voici la Judée, telle que nous l’avons vue, le premier jour, du haut des collines qui bordent la plaine de Ptolémaïs ; telle que nous l’avons retrouvée de l’autre côté des collines de Zabulon, de celles de Nazareth, et du pied du mont la Rosée-de-l’Hermon ou du mont Carmel ; telle que nous l’avons parcourue dans toute sa largeur et dans toute sa variété, depuis les hauteurs qui dominent Tyr et Sidon jusqu’au lac de Tibériade, et depuis le mont Thabor jusqu’aux montagnes de Samarie et de Naplouse, et de là jusqu’aux murailles de Sion. — Voici d’abord devant nous la plaine de Zabulon : nous sommes placés entre deux légères ondulations de terre, à peine dignes du nom de collines ; le lit qu’elles laissent entre elles, en se creusant devant nous, forme le sentier où nous marchons ; ce sentier est tracé par le pas des chameaux, qui en a broyé la poussière depuis quatre mille ans, ou par les trous larges et profonds que le poids de leurs pieds, toujours posés au même endroit, a creusés dans une roche blanche et friable, toujours la même depuis le cap de Tyr jusqu’aux premiers sables du désert libyque. À droite et à gauche, les flancs arrondis des